La pluie tombait drue sur la ville, détrempant ses ruelles sales. On aurait pu croire que ces eaux diluviennes auraient pu nettoyer la souillure qui infestait la cité, mais telles des larmes inconsolables faisant couler un maquillage bon marché, l'averse persistante ne faisait qu'étaler un peu plus la boue morale qui la maculait.
Avec un soupir, je contemplais la scène par la fenêtre. Sous mes yeux s'exposait ma ville et je la connaissais suffisamment pour en connaître les nombreux sombres secrets, pour qu'elle connaisse les miens...
On toqua à ma porte. Des coups discrets. Ephémère paradoxe d'un geste destiné à attirer l'attention tout en restant discret. Je songeais aux lettres clouées dessus. DETECTE. Quelqu'un avait cru bon de chouraver les lettre I et V de détective et il faudrait que je les remplace, mais les gens qui venaient ici savaient pertinemment ce qu'ils étaient venus chercher... Un dernier espoir.
[[D'un pas assuré j'allais ouvrir la porte->Bureau2]]
[[Je continuais à observer la ville, captivé->Bureau3]]Les coups cessèrent rapidement et la personne s'éloigna, son dernier espoir envolé. Elle ne m'attirerait pas dans sa spirale d'ennuis aujourd'hui, j'avais déjà suffisamment des miens.
[[Quelques temps plus tard->Bureau9]]Prestement, je me dirigeais vers la porte, inutile de faire attendre plus longtemps une personne dont le malaise était palpable. La silhouette qui se découpa dans l'embrasure aurait pu me couper le souffle mais mon instinct de vieux racle-trottoir me criait dans les oreilles qu'elle exhalait les ennuis à vingt bornes. Derrière une candeur factice et calculée, la jolie demoiselle semblait savoir très bien jouer des mâles instincts pour obtenir ce dont elle voulait. Pourtant si elle était là, c'est qu'elle était allé trop loin, une fois de trop en tous cas.
Je n'étais pas certain de devoir la faire entrer, je connaissais par coeur ce numéro de demoiselle en détresse. Alors pourquoi, ô grands dieux, pourquoi me laissais-je encore avoir? Etait-ce par ce que j'étais un détective ou parce que j'étais un homme? Je réagissais comme ces machines dans lesquelles passaient ces cartes perforées, incapables d'autres réactions que celles prévues.
Je la fis entrer lui demanda de se mettre à l'aise.
[[Lui prendre son manteau et lui proposer un verre->Bureau4]]
[[S'asseoir derrière son bureau et lui demander directement quel était son problème->Bureau5]]Avec les manières d'un homme civilisé, je l'aidais à s'installer, prenant son manteau détrempé et lui présentant sa chaise. Tout en allant accrocher l'épaisse capeline, je lui demandais dans un premier temps ce qu'elle apprécierait de boire. La jeune femme me demanda un simple verre d'eau, une rondelle de citron et une paille. Une façon comme une autre de jouer son rôle tout en gardant l'esprit clair, plus clair que le mien en tous les cas.
Ramenant sa boisson, je la posais sur mon bureau devant elle avant d'aller m'asseoir en face. D'un signe de la main, je l'enjoignis à m'exposer son cas. Elle prit dans un premier temps son verre afin de boire quelques gorgées d'eau, jouant au passage de ses lèvres sur le contour de la paille. J'imagine que ce petit jeu m'était destiné.
[[J'essayais tout de même de rester attentif au récit qui allait venir->Bureau6]]
[[Troublé, je n'écoutais pas vraiment ce qu'elle pouvait avoir à me confier->Bureau7]]La jeune femme sembla peinée de mon pragmatique manque de manière. Toutefois, je me souvins que, selon l'expression, même les crocodiles pouvaient avoir des larmes.
Sortant un mouchoir brodé dont je notais les initiales P.G., elle commença par m'expliquer en sanglotant à quel point la vie dans cette ville était impitoyable pour une naive jeune femme. Je hochais la tête, validant de fait son propos même si j'étais dubitatif sur le fait de pouvoir lui adjoindre ce qualificatif.
[[Prenant une voix douce et réconfortante, je lui demandais de poursuivre->Bureau6]]
[[Secouant la tête, j'exigeais qu'elle arrête de me faire perdre mon temps->Bureau8]]
Double-click this passage to edit it.Double-click this passage to edit it.P.G. sembla outrée par mes propos, sans doute déçue que son petit manège n'ait pas pris. Ce qu'elle espérait me faire gober devait être une pilule difficile à faire passer. Elle se leva et annonça qu'elle ne pouvait se résoudre à engager un tel rustre, puis elle partit en claquant la porte.
Je n'aurais probablement pas accepté une telle affaire de toute manière. Si elle avait besoin de tous ses artifices pour me convaincre, c'était sans doute dangereux.
[[Quelques temps plus tard->Bureau9]]Quelques temps plus tard, les huissiers vinrent saisir mes bien, faute d'argent pour payer mes créanciers. Puis je fus mis à la porte avant de finir dans le caniveau, une bouteille de bourbon à la main. Je rejoignais à jamais les ruelles de ma chère ville, seule amante qui ne m'ait jamais été loyale
FIN